À la recherche d'un boulot

Haylie entra dans la bibliothèque et se dirigea vers une table vide, une pile de journaux sous le bras. Cela faisait maintenant quelques temps qu'elle était à New York et elle n'avait toujours pas trouvé d'emploi. Aujourd'hui c'était décidé, elle alla éplucher toutes les petites annonces des journaux de la ville. Elle trouverait bien quelque chose d'intéressant qui n'impliquait pas de se déshabiller.

Elle sortit un stylo de son sac et commença ses recherches, barbouillant grossièrement les annonces dont elle ne voulait rien savoir.

Après un moment, elle laissa tomber son stylo sur la table en soupirant. Il n'y avait donc rien de bien à New York?! Tout ce qui était le moindrement intéressant était des annonces de serveuse, mais elle ne voulait pas devenir serveuse. Elle soupira de nouveau, elle devrait laisser sa fierté de côté. Il était évident qu'elle ne travaillerait pas dans son domaine, pas pour l'instant du moins.

Elle se laissa aller contre sa chaise et étira les bras vers l'arrière pour les dégourdir. Elle accrocha par mégarde quelqu'un qui passait derrière elle à ce moment.

Elle se tourna et dit avec un sourire désolé:

-Excusez-moi, je ne regardais pas.

Invité

Roy lui aussi regardait ailleurs lorsque la main d'une jeune femme vint percuter les livres qu'il pressait d'une main légère sur son torse. Il était occupé à trouver la section "Littérature italienne", qu'on lui avait dit assez fournie dans cette bibliothèque. L'un de ses livres (La Dialectique éristique, de Schopenhauer, si jamais ça intéressait le lecteur) tomba à cause du choc, entraînant avec lui les deux autres ouvrages que l'Ecossais tenait.

Alors qu'il ramassait les dits opuscules et jurait intérieurement contre l'insolent qui l'avait bousculé, il entendit la voix désolée d'une jeune femme. Relevant la tête, intrigué, il découvrit le visage de l'instigatrice de l'incident, une fillette qui venait d'arriver dans la vie et qui lui souriait en guise d'excuse. Royal Wesson n'étant pas connu pour être un homme impoli, il lui sourit en retour et dit.

"Ce n'est rien, les livres ne se plaignent jamais, de toute manière. Je m'appelle Royal Wesson." (Il prit ses bouquins d'une main pour tendre l'une de ces larges mains vers Haylie.) "On dirait que vous détestez les journaux de la ville, à en juger par la façon un peu véhémente que vous avez de vous en servir, Mademoiselle... ?"

La jeune femme serra la main de l’homme en souriant toujours. Elle était heureuse de ne pas être tombée sur un personne qui se serait rapidement mit de mauvaise humeur suite à ce petit incident.

-Freeman. Haylie Freeman.

Elle baissa son regard vers les journaux qui tapissaient maintenant la petite table. Ils étaient froissés, démantelés, barbouillés. Elle fit un petit sourire gêné et tenta de remettre de l’ordre dans la pile de journaux.

-Je crois que je me suis un peu laissée emporter. Le désespoir de ne pas me trouver un emploi satisfaisant probablement. Je dois avouer que je n'ai lu aucun des articles de ses journaux. Je trouve les journalistes parfois trop sensationnalistes à mon goût.

Elle termina de faire une petite pile avec les journaux et retourna son attention vers Royal.

-Arthur Schopenhauer a dit: « La faiblesse de notre intelligence et la perversité de notre volonté se soutiennent mutuellement. ». Je trouve que cela correspond bien aux journalistes en général.

Elle avait remarqué que l'homme avait un livre de Schopenhauer avec lui. Durant ses années universitaires, ce philosophe avait été l'un de ses favoris.

Invité

A la réplique de la jeune femme - "Haylie" -, Royal partit d'un grand rire franc. Impressionné par les solides connaissances de cette américaine et enthousiaste à l'idée qu'une fille comme elle (qui chiffone des journaux et gribouille les annonces d'emploi) puisse détenir un tel capital culturel.

"Si on écoutait Schopenhauer, nous ne parlerions pas à l'instant même. Ce triste philosophe a pourtant raison sur bien des points.
Enfin, je suis enchanté de vous rencontrer, Mademoiselle Freeman. Et je suis persuadé que vous trouverez rapidement un emploi. Dans quel domaine travaillez vous ?"

Elle hocha la tête. Il avait bien raison. Schopenhauer était , comme plusieurs philosophes, plutôt pessimiste, presque absurde par moment.

Elle hésita un moment lorsqu'il lui demanda dans quoi elle travaillait. Ce n'avait jamais été bien clair. Ce devait être pour cela qu'elle ne trouvait aucun emploi qui lui convenait.

-J'ai étudié en littérature. Cela m'offre un éventail de possibilités, que je ne sais malheureusement pas bien saisir. J'ai travaillé surtout pour des revues spécialisées après avoir tenté ma chance comme scénariste. J'avais envie d'un peu de changement, mais je crois que je vais devoir re-signer quelques articles littéraires dans les revues.

Elle rangea mon style dans mon sac et se leva. Même debout, Royal Wesson paraissait encore très grand, presque intimidant.

-Mais je ne voudrais pas vous importunez plus longtemps. Vous n'étiez pas venu ici pour parler avec une pure inconnue.

Invité

"Il n'y a pas de mal, répondit Royal d'une voix distraite. Il arborait un visage pensif, réfléchissant de façon ma foi fort philosophique sur le hasard et sa bienveillance erratique. Il avait en effet un ami de Broadway qui recherchait, lui disait-il il y a quelques jours, quelqu'un pouvant s'occuper de certaines tâches ingrates mais nécessaires à la digne production d'une comédie de.

Comme M. Wesson n'était pas du genre à faire dans le détail (surtout lorsque ça ne le touchait pas directement), ce dernier lui dit.

"J'ai quelques connaissances de Great White Way qui rêveraient de pouvoir avoir une assistante comme vous. J'ai d'ailleurs un ami qui travaille sur l'un de ses projets et qui recherche une jeune femme pour l'aider dans sa réalisation d'une comédie musicale. Si jamais le coeur vous en dit et que vous lui plaisez, il pourra vous donner un emploi. Bien sûr, ce ne sera pas très valorisant, mais il n'y a pas de meilleur moyen pour entrer dans le business, croyez-moi."

La jeune femme était prête à partir et à laisser cet homme important, c'est du moins l'impression qu'il lui faisait. Il lui proposa alors un contact pour un emploi. Elle resta muette un moment, trop bouche-bée pour dire quoique se soit. Elle fini par se donner une claque mentale.

"Ferme la bouche ma vieille, c'est pas très jolie!", se dit-elle avant de sourire.

-Je ne sais sincèrement pas quoi vous dire. C'est très gentil de votre part. Je... Je ne refuse évidemment pas de rencontrer votre ami s'il le veut.

Elle n'en revenait tout simplement pas. Un homme, inconnu qu'elle avait à peine rencontrer et avec qui elle n'avait échangé que quelques mots, lui offrait la possibilité de travailler. Elle se doutait qu'un emploi d'assistante ne devait pas être évident. Une espèce d'esclave des temps modernes. Mais il avait raison, quelle belle opportunitée d'entrer dans le milieu et rapidement.

-Je ne sais pas comment vous remercier.

Haylie détestait devoir rendre des comptes à quelqu'un. Elle préférait largement venir en aide aux autres que de se laisser aider.

Invité

"Ne me remerciez pas, vous n'êtes pas encore prise, répondit Royal en écrivant sur l'un des journaux le numéro dudit ami de Broadway. Voilà, c'est fait. Bien, je ne vous importune plus. Essayez d'être rapide et, si je peux vous offrir un conseil, ne vous taisez pas quand il vous l'ordonne et si vous êtes convaincue que votre opinion est la bonne. Il adore avoir tort, surtout lorsque c'est une femme qui le lui prouve."

Alors, il serra d'une poignée énergique la main d'Haylie et dit d'un air affable.

"Au revoir Mrs. Freeman, nous nous rencontrons sûrement à nouveau."

Cela dit, il reprit sa pile de livre et prit le chemin de la littérature italienne d'un pas décidé.

» Boulot quand tu nous tient^^ [libre]